Ruta 40 (part 2)

27/02/17

Réveil frisquet vers 8 h. Le ciel est globalement gris, seulement parsemé de quelques timides ouvertures bleues. Petit café. J’hésite à prendre les baffles d’Oliver et à envoyer un gros son bien gras du coté des djeuns… Mais j’ai passé l’âge de ce type de bassesses et préfère utiliser mon énergie à trouver le bon angle pour immortaliser la sublime vue qui s’offre à moi.

 

 

Il fait frais et gris, donc tenue de combat. Chaussettes en poils de yak, collant isotherme, mérinos manches longues, T-shirt par dessus, pull en poils de yak, pantalon de moto, surpantalon de pluie, blouson de moto avec doublure, bottes de moto, cache-gorge et gants d’hiver. Me voilà paré. Nous nous lançons à travers le parc qui nous offre des paysages, encore une fois, exceptionnels.

Nous croisons des troupeaux entiers de guanacos indifférents à notre passage et au bruit des motos. Nous sommes aussi suivi d’en haut par un majestueux condor.

 

 

Quelle beauté ce parc ; nous nous arrêtons toutes les dix minutes pour prendre des photos, profiter de la vue et discuter de nos impressions. La bruine n’entame en rien notre enthousiasme à explorer.

 

 

 

Vers la fin de la matinée, nous voyons sur la route un panneau « cascadas 7 km ». Oliver fait la moue en me disant qu’on en a déjà vu mille et qu’une cascade reste une cascade… Ahahahah. Je repars dans un argumentaire qui le fait m’interrompre au bout de quelques minutes, comprenant que j’aurai de toute façon le dernier mot. Nous arrivons sur un parking et un autre panneau indique une petite marche d’un kilomètre pour la cascade que nous entendons déjà gronder d’ici. Oliver me regarde d’un air suppliant mais en vain, je suis déjà sur le chemin. Nous arrivons devant la cascade, impressionnante par son débit. Un petit mirador limite le passage qui descend bien plus bas en dessous. Je passe à coté et commence la descente. Oliver me suit sans même un mouvement de désapprobation. Quel transgressif… La vue en contrebas est spectaculaire car elle permet de se rendre compte de la masse d’eau incroyable qui se déverse 20 m plus bas.

 

 

Je propose à Oliver de s’approcher au maximum en remontant pour lui faire une belle photo. Il lui pousse des ailes. Faut juste avoir le bon argument avec la génération 2.0 pour les voir décoller.

Nous échangeons les rôles, parce que, moi aussi, je veux ma photo, et nous repartons sous le regard perplexe de trois japonais (l’hôpital qui se fout de la charité…).

 

Nous continuons notre photo tour, mais le temps se dégrade et il n’y a plus vraiment de plaisir à engranger des images. Nous arrivons vers la sortie du parc et un motard venant en sens inverse s’arrête et nous fait signe. Je ralenti et réalise au moment où je m’arrête à son niveau que je suis en face de Dédé la glue. Putain…

– Ben alors ? Je vous ai fait des grands signes au mirador, vous m’avez pas vu ?

– Ah ?!… Ben non, y’avait plein de motards, on t’a pas vu.

– Vous faites quoi là ? Vous venez boire un coup ? Je suis au camping à 200 m.

– Ben… C’est à dire… En fait, on aimerait bien être à Puerto Natales ce soir parce que faut qu’on trace, on est attendu à Ushuaia.

– Haaaaann, ben c’est con ça, on aurait pu se marrer !

– Ouais, ben ouais c’est dommage mais peut être qu’on se recroisera !

– Ah c’est sûr, on va dans la même direction !

– C’est sûr…

J’enclenche la première, lui fait un signe de la tête et démarre. Oliver n’avait même pas coupé son moteur ni enlevé son casque. En gros, démerde-toi. Je comprends, si Dédé avait parlé allemand j’aurais surement fait la même chose…

Nous avalons une petite centaine de kilomètres sous un crachin “breton” et arrivons à Puerto Natales. Nous faisons escale dans un hostel un peu miteux mais pas cher. Ma roue arrière commence à être bien entamée. Je vais dans plusieurs gomerias pour me renseigner sur un éventuel remplacement de pneu, mais tout le monde me renvoie vers Punta Arenas. Petit ravitaillement au supermercado ; je décide de cuisiner ce soir, car je n’en peux plus des mini sandwichs jambon-fromage et des pâtes aux saucisses. Ce sera donc salade-concombre-maïs-pommes-mangue avec quelques tranches de jambon fumé et une bonne bière. Oliver apprécie.

28/02/17

Nous reprenons la ruta de la fin del mundo en direction de Punta Arenas pour régler tous nos problèmes mécaniques et prendre un peu de repos. 250 km, un trajet court qui nous permet d’arriver en fin de matinée, de nous poser dans un hostel sympa et propre et de commencer les recherche de garagistes.

 

 

Le premier semble être la référence de la ville selon l’appli “iOverlander”. L’entrée où sont alignées une dizaine de BMW GS annonce la couleur. Pas vraiment le temps de lui demander quoique ce soit, il nous fait comprendre qu’il est débordé et que nous pouvons passer notre chemin. Okay. Suivant.

La pluie se mêle à la fête et nous atterrissons devant l’adresse que nous indique Google mais qui semble être une maison de particulier. Une mère de famille ouvre la porte et nous demande ce que l’on cherche. Je lui répond que son adresse est mentionnée comme étant un garage. Elle hoche la tête toute excitée et nous fait signe de patienter. Sous la pluie. Quelques minutes plus tard, un ado sort de la maison et vient à notre rencontre. Il nous explique que c’est lui le mécano. Oliver fronce les sourcils. Mais, il pleut et j’aime bien l’idée de l’ado bidouilleur.

Il nous fait entrer dans son garage et s’ensuit la longue explication des problèmes de la moto d’Oliver et la question du changement de pneu de la mienne. Il est hésitant et un peu timide, mais a l’air de savoir ce qu’il fait. Il m’explique qu’il faut qu’il fasse des tests pour comprendre ce qui ne va pas et que ça devrait être réglé dans 2 ou 3 jours. La rigueur allemande reprend le dessus et Oliver me dit qu’il préfère essayer de trouver un « vrai » garage. Je fais donc comprendre à l’apprenti mécano que nous ne pouvons pas attendre 3 jours et lui souhaite bon courage pour la suite.

Retour à la pluie pour l’adresse suivante. Un magasin d’enduro (moto cross) KTM, qui cherche à nous vendre tout ce qu’il peut sans succès, mais qui nous lâche quand même une adresse de garage moto. Re-pluie, nous arrivons à l’adresse, mais c’est la pause dèj (13h – 16h30…). Nous reviendrons plus tard.

Nous retournons à l’hostel où nous avons juste déposé les bagages et prenons le temps de déjeuner, faire une lessive et ranger les sacs. Nous sommes dans un dortoir de 12 personnes et tâchons de prendre le moins de place possible : sacs sous les lits et sacoches dans les casiers.

Vers 16 h nous repartons à la chasse aux garagistes. La pluie s’est arrêtée. Nous passons chez un garage Honda pour voir s’ils ont des pneus mais non, rien aux dimensions de mes jantes. Retour chez le garagiste qu’on nous avait conseillé et qui est maintenant ouvert.

Le type nous dit qu’il a du boulot mais qu’il peut s’occuper de nous demain à la première heure. L’endroit est rempli de motos en tout genre, propre et bien organisé. À l’allemande. Oliver revit. Nous rentrons donc satisfaits et passons la fin de la journée à errer sur internet jusqu’à ce que la fille de l’accueil vienne me voir en me disant que l’odeur de gasoline dans la chambre est insupportable et qu’il faut faire quelque chose.

Je fonce vers la chambre ouvre mon casier et me rend compte que mon bidon d’essence fuit et que son contenu s’est répandu dans plusieurs casiers. Je sors les sacoches sous les regards agacés des colocataires du dortoir en m’excusant platement. L’intendante des lieux vient à ma rencontre et me fait signe de la suivre dans le local des produits ménagers. Je me lance alors dans la lourde tâche de faire disparaitre l’odeur d’essence de la chambre à coup de désodorisant, de javel, et de petits sapins parfumés. Je m’en sors plutôt bien compte tenu de ce qui s’est répandu. Seul le mec qui a le casier en dessous du mien et dont les affaires sont couvertes de super 95 fait vraiment la gueule. Je comprends. Je lui propose de laver ses affaires mais il m’envoie chier. Une bière peut-être ? Ses yeux m’indiquent de dégager. Je dégage.

01/03/17

 

 

Au garde à vous à 8 h 45 devant la porte du garage qui ouvre à 9 h, nous guettons l’arrivée de notre sauveur. Enfin du sauveur d’Oliver, moi j’ai juste à changer un pneu. Jésus arrive comme une fleur vers 9 h 45 interrompant le discours indigné qu’Oliver me tient depuis 45 min sur le respect du client et l’importance de la ponctualité. Il a découvert ce matin que sa fourche avait un peu de jeu et a déclaré sa moto hors-service. Je le rassure en lui disant qu’on va régler tout ça ce matin. Le mécano se met au travail sur la moto d’Oliver mais ne semble pas vraiment comprendre ce qui ne marche pas car, d’après ses tests, la batterie se recharge sans problème. Oliver fulmine en me demandant de lui dire (oui, parce que je suis toujours traducteur officiel avec mes 3 mois d’espagnol…) d’insister et de chercher encore. Ça commence à me gonfler. Du coup je branche le mécano sur mon changement de pneu. Il passe un coup de fil et me dit que c’est bon on peut aller les acheter. Cool, je pars avec lui et laisse Oliver avec les stagiaires qui s’occupent de sa fourche. Le magasin n’est pas loin et, oh surprise, c’est en fait le premier garage où nous sommes passés. Le type semble cette fois très dispo…

J’achète mes pneus (Heidenau K60 Scout M+S, une tuerie) et nous repartons.

Les stagiaires on remis de l’huile de fourche, mais Oliver ne semble pas satisfait. Il me dit que ce sont des amateurs et qu’ils n’y connaissent rien. Il commence à me saouler et j’ai bien envie de le planter là avec ses angoisses mais je n’en fais rien, l’empathie et la solidarité entre motards prennent le dessus.

Mon pneu est changé. Le mécano ne semble pas disposé à faire quoi que ce soit de plus sur la moto d’Oliver, lui expliquant qu’il a fait tout ce qu’il pouvait et que pour lui sa moto est bonne pour la route. Oliver est frustré mais nous repartons car le garagiste est déjà sur une autre moto.

Je lui dis que ça va aller, que s’il y a quoi que ce soit, de toute façon on est deux et on trouvera une solution. Il se calme un peu et se résout à continuer la route le lendemain.

La fin de journée se passe à l’hostel car le temps est venteux et pluvieux. Repos donc jusqu’au lendemain.

02/03/17

Nous décollons en fin de matinée pour une étape de 350 km qui doit nous amener à la frontière Argentine, à San Sebastian. Le ciel est couvert et la pluie commence à tomber. La route me semble longue et je commence à sentir la fatigue accumulée jouer sur ma concentration. Concentration très importante lorsqu’on roule sous la pluie, qu’il y a du brouillard et que la route, même asphaltée, est glissante et pleine de nids de poule. Nous sommes désormais dans la partie « hostile » du trajet, le vent souffle fort, mes membres sont engourdis par le froid et l’humidité, je n’arrive pas à trouver une position confortable sur la moto, les intervalles entre les pauses sont de plus en plus courts. Il n’y pas vraiment d’endroits à l’abri des éléments qui me malmènent, le paysage est désertique, le ciel est bas et la vitesse à laquelle bougent les nuages lui confère des allures apocalyptiques. 4 h 30 pour faire 200 bornes…

 

Arrivée au ferry qui nous emmène en Terre de Feu ; le temps reste oppressant et il n’y pas d’endroit où se mettre à l’abri sur le bateau, qui n’est rien d’autre qu’une plateforme flottante, à part dans les toilettes. So be it. Le trajet dure une vingtaine de minutes et nous y voilà.

 

 

Le bout du continent. Je reprends du poil de la bête et essaye de partager ce regain d’énergie avec Oliver qui semble se décourager. Il se redresse et semble à son tour et se remotive. C’est nécessaire car nous entamons 160 km de piste dégueulasse (nids de poule dissimulés dans les flaques, tôles ondulées, boue, cailloux…) pour arriver à la frontière. Oliver fait une sortie de piste et nous relevons la moto engluée dans l’agglomérat de boue et de cailloux tant bien que mal.

 

La visibilité est réduite par la pluie et le vent demande une gestion exténuante de l’équilibre de la moto. J’y trouve malgré tout une espèce de bonheur dans la difficulté et l’effort que cela demande, mais aussi dans le détachement et l’acceptation de la situation dans laquelle je suis. Je garde à l’esprit le tableau complet de mon entreprise et mes ressources physiques et morales me semblent illimitées. Peut être une sorte de transe dans laquelle se révèlent des capacités inconnues jusque là. Une compréhension plus large de mes possibilités et de ce que je suis capable d’endurer. Masochisme, me diront certains, exaltation dans le dépassement de soi leur répondrai-je. J’ai toujours été fasciné par les possibilités dont disposent les humains lorsqu’ils sont sous l’emprise de la foi ou d’une vérité qui leur permet de se transcender. Cela m’inspire.

Nous arrivons trempés et fatigués à 500 m de la frontière, une hosteria sur notre droite semble être la seule preuve d’activité humaine alentour. Il est 19 h et le ciel est tellement gris qu’il semble faire nuit. Nous jugeons sage d’arrêter là nos efforts et de nous offrir un bon repas, une douche chaude et un lit douillet bien mérité.

 

03/03/17

 

 

Aujourd’hui nous avons rendez-vous au bout du monde. Les 300 derniers kilomètres du périple…

Le ciel s’est un peu dégagé et nous avons dormi comme des loirs. Nous prenons le petit déjeuner plein d’enthousiasme ; la motivation est là. Une immense mare devant l’hosteria nous fait sourire et nous rappelle la journée d’hier. C’était vraiment dur.

 

Nous chargeons et nous rendons au poste frontière à quelques centaines de mètres de là. Holà. Papeles. (Bruits de tampons). Gracias.

C’est parti. Le paysage se fait plus varié, nous passons par quelques cols nous offrant de belles vues sur des lacs gorgés des pluies de la veille. Nous passons aussi par des zones de brouillard épais où la visibilité est réduite à quelques mètres. Nous prenons le temps cette fois de nous arrêter pour prendre quelques clichés et apprécier la vue quand le temps le permet.

 

 

Je remarque, au bout d’un moment, qu’Oliver n’est plus dans mon rétroviseur. Comme nous sommes dans les hauteurs et que la route est une succession de virages, je décide de me mettre sur le bas-côté et d’attendre qu’il me rattrape. 5 min. 10 min. Un couple en voiture s’arrête à ma hauteur et me demande si je voyage avec un ami sur une moto noire. Oui. Il est apparement en panne sur le dernier mirador où nous nous sommes arrêtés. Gracias. Je repars dans sa direction. Je retrouve Oliver dont la batterie est à plat et qui ne peut donc pas redémarrer. Comme je n’ai pas du tout envie de défaire tous mes sacs et de démonter mon aile pour accéder à ma batterie, je lui propose, vu la pente et l’espace, de le pousser pour qu’il puisse démarrer en seconde. Il accepte. Je pousse, le moteur s’anime, Oliver est content. Il grogne quand même contre le garagiste de Punta Arenas et me fait part de son intention de régler le problème une fois pour toutes à Ushuaia. J’acquiesce. Nous repartons. La route est agréable malgré le froid pénétrant et l’humidité. Plus de vert, de courbes, de reliefs, de hauteur.

 

 

Je regarde mon compteur qui assure le décompte de notre arrivée. Plus que 50 km ; 30 ; 10 ; 5. Ça y est, nous y sommes. À l’entrée de la ville, deux grands pylônes se dressent sur lesquels on peut lire en lettres blanches : USHUAIA. Mission accomplie.

 

 

Un peu plus de 12 000 km et 5 mois depuis le départ de Santiago, passés à sillonner le Chili et l’Argentine pour arriver enfin à « La fin del mundo ». Quelle expérience incroyable ! Je me sens riche, plein de vie et d’envies. Toutes ces rencontres, tous ces paysages, cette immensité, ces centaines d’heures passées sur ma moto, ce voyage intérieur aussi, des souvenirs plein la tête, un sentiment de plénitude et d’accomplissement.

Et puis Oliver me dit qu’il faut trouver immédiatement un bon garagiste… Je souris. Je lui dis de prendre le temps de savourer le moment, mais non, ses priorités sont ailleurs. Je fais un petit tour sur internet et il semble qu’il y ait un garagiste pour motards digne de confiance en ville. Nous nous y rendons et rentrons dans ce qui semble être l’accueil à côté du garage. La centaine de coupes et trophées divers qui recouvrent les murs nous indiquent un passionné.

 

Pablo arrive et nous invite à passer dans le garage. Ce petit bonhomme est un champion d’enduro et pilote des motos depuis 40 ans. Normalement, il connait son taf. Explication des problèmes, tests, diagnostic, pour lui c’est l’alternateur. Il demande immédiatement si les poignées chauffantes sont d’origine. Je me tourne vers Oliver, traduit, non. Elles sont chinoises et pas chères. Pour lui, c’est ça. Elles ont trop sucé sur la batterie et fait fondre l’alternateur. Oliver exulte… Enfin un mec à la hauteur. Mais là, il a plein de boulot. Demain, en fin d’aprèm, il pourra s’occuper de ça. Très bien.

Il nous demande si on cherche un endroit où dormir. Oui. Il appelle sa belle-sœur qui possède des apparts dans les hauteurs de la ville et elle nous propose un prix décent par rapport à ce que nous avons vu dans nos recherches. Nous acceptons. Il nous donne l’adresse, nous serre la main et nous dit à demain. On aime bien quand ça se passe facilement comme ça. Chulla nous accueille comme si nous étions de la famille et nous montre l’appart. Il y a une chambre avec un lit double et un lit simple dans le salon, une vraie cuisine, une salle de bain propre et un chauffage à bloc. Je prends la chambre sans même poser la question à Oliver (privilège de l’âge…) qui sourit et admet qu’il a été chiant et que je l’ai bien méritée. Nous pouvons enfin nous détendre et savourer notre première soirée au bout du monde…

3 thoughts on “Ruta 40 (part 2)

  1. Photos très parlantes et récit très prenant … d’autant plus que je suis chaudement installé au coin du feu ! En tout cas bravo pour avoir atteint ton objectif en touchant le bout du monde.

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