La fine équipe
10 novembre 2018, Potosi, Bolivia
Nuit un peu moins agitée que la précédente. J’y vais tranquille aujourd’hui. Après le petit déjeuner, je pars faire un tour sur la place pour voir ce que réserve le jour de l’indépendance. Re-fanfare, re-tsoin-tsoin.
Ça m’agace vite. Je rentre et pars pour le visionnage d’un film, activité qui se transforme en sieste. De 6 heures… Vers 17 h donc, Kathy me propose d’aller faire un tour. Elle m’explique un peu la ville, me montre les marchés et les endroits qui lui plaisent. Nous regardons les montagnes alentour se couvrir de nuages et de trainées de pluie.



Sur le retour nous passons devant un alléchant asado. Le mec ne rigole pas du tout.

La pluie semble contourner la ville et le soleil lâche un dernier rayon avant de disparaitre derrière les montagnes.

Retour à la Casa Blanca. Le tour en ville m’a fatigué… Je grignote une connerie et me recouche. Journée très, très tranquille donc…
11 novembre 2018, Potosi, Bolivia
Au réveil, je me familiarise avec le groupe dans lequel je m’intègre en ce moment. Kathy m’a présenté tout le monde, mais il faut toujours passer un peu de temps avec chacun pour créer une intimité et découvrir les personnalités. Je décide donc de lancer une séance de Polaroïds.
J’attrape le sac du Mamiya, l’ouvre et sors l’appareil en le prenant par le “tour de cou” du boitier. Le boitier sort mais l’objectif reste dans le sac… Chose anormale. Je me penche et constate avec effroi que l’objectif s’est désolidarisé de sa baïonnette ; probablement à cause des secousses de la moto. Santi vient voir ce qui se passe. Je récupère quelques micro-vis au fond du sac et commence à chercher sur internet un manuel explicatif ou un diagramme qui m’expliquerait comment remettre tout en place. Santi est photographe amateur et s’intéresse pas mal à la technique. Il aime ce genre de problème délicat et précis. Nous trouvons un diagramme de la même marque pour un autre objectif, mais les pièces détachées que nous avons entre les mains correspondent ; cela fera l’affaire. Le réassemblage n’est pas simple mais nous finissons, après quelques heures, par comprendre tous les mécanismes et refermer l’objet. La séance peut commencer…




Mariela Kathy Sonia
Mati Vincent Escayla
Lilian Lucho
L’heure est venue d’aller se mettre quelque chose sous la dent. Direction la Plaza de armas et la mamita avec ses sandwichs extraordinaires. Événement de taille cet après-midi : Finale de la “Copa de los liberadores” (Tournoi de foot interclubs le plus coté d’Amérique du sud) retransmise à la télé. Les deux équipes en finale sont argentines : Riverplate Buenos Aires contre Boca Junior Buenos Aires. Autant dire que mes nouveaux coéquipiers argentins misent leurs vies sur ce match…
Mais avant cela, petite partie d’échec avec Mati. Mati a une grande barbe, les yeux verts, malicieux et intelligents, il est mélomane, guitariste et son sourire tendre et moqueur me nargue au moment où il me prend ma dame.

Je réussis quand même à mettre la peignée au jeune “troubade”, mais il s’en faut de peu. En route vers un bar pour le match.

Cervezas y piqueos (bières et tapas). L’équipe de Potosi est en faveur de la Boca Junior qui marque le premier but ; les verres vibrent sous les hurlements, la bière coule à flot, les sourires débordent de dents et les cœurs battent fort. Quelques minutes plus tard, égalisation… C’est l’ascenseur émotionnel, mon équipe d’argentins est sur des charbons ardents, ils “pestifèrent” contre un joueur dont je n’ai pas retenu le nom. Ni le prénom, ni la couleur, ni rien du tout. Mais j’aime les regarder vibrer. Mi-temps ; nous sortons du bar fumer un paquet, vidés que nous sommes par tant d’exaltation.



Ça débat, ça spécule, ça tourne le problème dans tous les sens, ça rigole, se moque, joue des épaules et de la casquette, puis s’en retourne dans le bar pour la seconde mi-temps. Nouveau but de La Boca. Ils sont debout, main sur le cœur, visage levé, chantant fièrement l’hymne de La Boca. Puis égalisation de nouveau. Le visage dans les mains, recroquevillés sur leur chaise, c’est le silence dans la taverne. Le match se termine sur cette égalité. Nous sortons du bar, et déambulons dans les rues en pentes de Potosi pour rejoindre la Casa Blanca.

Arrivés à l’hostel, je m’assoie à une table avec Vincent et Lillian, deux français avec qui je fais connaissance. Vincent a travaillé à l’hostel pendant quelques temps ; c’est là qu’il a rencontré Kathy. Lillian est son ami d’enfance qui l’accompagne une partie de son voyage. Tous deux sont de bons marcheurs (je m’en rendrai compte plus tard…) et férus de trekking. Vincent peint aussi des aquarelles dans sont carnet de voyages. Jolies. Kathy se joint à nous et nous propose d’aller voir le spectacle dans lequel joue Escayla, la fille de Mariela, qui fait le ménage de l’hostel. Nous nous regardons sceptiques, hésitants, mais Kathy, à force d’arguments et de persuasion, réussi à nous décider.
En route donc pour le théâtre-opéra de Potosi. Comme l’Opéra Garnier mais sans les fioritures.


L’attente est longue, très longue… Même Kathy et sa générosité n’en peuvent plus. La scène de la gamine est la dernière du programme… Mais nous jouons le jeu jusqu’au bout car la mère et sa fille sont vraiment adorables et Escayla était vraiment impatiente que nous la voyions sur scène. Fin du supplice. Il est minuit…

Il fait frais dans les ruelles. Nous rentrons doucement en discutant avec la fillette de sa performance ; elle est ravie que nous soyons restés pour la voir et son sourire nous fait oublier notre interminable attente.
12 novembre 2018, Potosi, vers Sucre, Bolivia
Il est temps de reprendre la route. Aujourd’hui je vais à Sucre, capitale constitutionnelle du pays. Kathy me recommande l’hostel Casa Blanca là-bas. Chivo, le propriétaire, est, parait-il, très sympa. Il semblerait que l’équipe argentine suive. Après un maté fédérateur et des accolades à tout le monde, je me mets en selle.

Vue dégagée sur la ville en passant sur la colline opposée.

Peu de bornes à faire aujourd’hui puisque Sucre n’est qu’à 150 km. Je trouve la Casa Blanca sans encombre mais les rues sont très pentues et chaque virage m’envoie de belles décharges d’adrénaline. Vincent et Lillian sont déjà arrivés. Je prends une place dans le dortoir avec eux. Je vais faire un tour en ville et monte voir le mirador conseillé par Kathy. Vue imprenable sur la ville.

Je pars me perdre dans les petites ruelles derrière qui, pour une raison obscure, me rappellent Montmartre…


De retour au QG, tout le monde est arrivé et nous lançons l’idée d’un bivouac aux “7 cascadas” pour le lendemain. Le site nous a été conseillé par Chivo, le proprio de l’hostel. Tout le monde est mort après sa journée de voyage donc la soirée ne s’éternise pas.
13 novembre 2018, Sucre, Bolivia.
Levée de bonne heure, toute la troupe s’active autour du petit déj’ et commence à organiser le bivouac. Tranquillement.

Un peu avant le déjeuner nous partons faire les courses au marché. Qu’est-ce que j’aime les marchés en Amérique du sud. C’est un bordel sans nom, mais il y a de la poésie, des couleurs et des odeurs loin de mon quotidien français… Les monticules de fruits, de légumes et de graines en tout genre donnent du relief à cet espace confiné. Il n’y a pas de règles, la nourriture se vend aussi bien par terre que sur les étals et ce n’est pas forcement meilleur sur les étals.




À notre retour, nous préparons des gamelles pour le campement.
Deux heures plus tard nous voici en route pour la montagne. La fine équipe des 7 cascades… Nous patientons à un coin de rue pour prendre le “colectivo” (camionnette d’une vingtaine de places assises) qui nous emmènera à bon port.

Nous rôtissons une quinzaine de minutes au soleil avant de le voir enfin arriver. Il est évidemment plein à craquer et nous avons bien sûr d’énormes sacs à dos. Tellement plein que les portes ne ferment plus. Même pas peur.

Plus nous nous éloignons de la ville, plus le bus se vide ce qui nous permet de nous asseoir.

Une petite heure plus tard, nous arrivons au terminus dans un petit village sans nom. Nous en longeons l’orée et suivons l’arête qui descend lentement mais surement dans les gorges où se trouve notre destination.

Nous trouvons un espace plat pour le bivouac, montons les tentes et commençons l’exploration.

Je pars avec Mati remonter la rivière en éclaireurs. Nous trouvons la première cascade et la seconde juste au dessus. Je m’offre une petite grimpe d’une dizaine de mètres sur le côté de la chute d’eau.


Encore un peu plus haut, nous arrivons à la troisième cascade. Elle nous parait appropriée pour un petit bain rafraichissant. Très rafraîchissant même… L’eau doit être à 15 degrés maximum.

Mati se lance en premier et je reste sur le côté pour y aller progressivement en bon papi que je suis lorsqu’il s’agit de changements de température brutaux.

D’abord les mollets. Petite pause pour s’accoutumer. Puis les avant bras. Petite pause. Le torse. Pause. Et enfin la nuque avant de se tremper entièrement. Voilà, voilà. Je tiens ces conseils avisés de Momo, mon grand-père, qui, jusqu’à 90 ans, se baignait régulièrement dans les eaux “glaciales” de la Pointe du Devin à Noirmoutier.
Une fois dedans, le plaisir est total. Nous nous séchons avant que les derniers rayons de soleil passent derrière les montagnes et repartons vers le campement.
Nous trouvons l’équipe en train de siroter un Fernet-Quelquechose dans une bouteille en plastique découpée.


Les musiciens sortent alors leurs instruments pour une petite session musicale en attendant le coucher du soleil. Mati à la guitare, Vincent à la flute.


Un petit feu pour nous réchauffer à la nuit tombée, une bonne plâtrée de pâtes et nous laissons la lune nous border et veiller sur notre bon sommeil.


14 novembre 2018, 7 cascadas, Potosi, Bolivia
Nous partons tous ensemble ce matin à la conquête des 7 cascades. Quelques passages délicats pour qui ne veut pas mouiller ses chaussures, mais tout le monde s’en sort bien.
Pause pour certains à la troisième qui se prête bien au farniente. Les plus téméraires poursuivent.

La quatrième et la cinquième sont calmes et d’un bleu-vert opaque. Nous poursuivons.

La sixième offre un petit challenge à qui veut continuer.
La septième restera un mystère car nous ne l’avons jamais trouvée…
Nous redescendons doucement au camp sous la chaleur écrasante du soleil montant. Arrivés sur place nous démontons les tentes et commençons l’ascension du retour. Mon sac me pèse… Je suis très lent. La tente, le drone, l’appareil photo et la bouteille de flotte conjugués à cette chaleur me font battre les tempes, mais j’arrive quand même à me trainer jusqu’au terminal des bus du village.
De retour à la Casa Blanca, plus de lits disponibles. Chivo, le propriétaire, pensait que nous reviendrions un jour plus tard. Marcos et Mati prennent leurs bagages et partent pour un autre hostel. Je reste là un moment, espérant négocier quelque chose (plus facile tout seul…) car j’ai vraiment la flemme de changer d’endroit avec tout mon bazar. Je n’ai même pas le temps de penser à ma négociation que Chivo me propose un lit dans la chambre des volontaires qui bossent là en échange du gîte. Chambre de 3 m sur 2 m avec triple couchage superposé. Ça fera largement l’affaire.
De leur côté, les argentins ont trouvé un hostel de gringo qui fait aussi bar/lounge/boite et me convient à venir y boire un verre.
Je me lance. Musique de merde et ambiance touriste, mais la compagnie des deux loustics est tellement drôle que je m’amuse. Après plusieurs bières et de franches rigolades nous partons nous perdre dans la boite jusqu’au milieu de la nuit où je les abandonne car, oui, j’ai des horaires de papi et je choie mon sommeil…
Je rentre tranquillement à travers les rues pentues de Sucre, et je retrouve enfin la Casa Blanca, après moult détours indésirés.
15 novembre 2018, Sucre, Bolivia
Réveil tardif et légère gueule de bois ; j’erre un peu dans l’hostel avant de rejoindre mes comparses au marché central où je découvre quelque chose qui va me servir tout le long de mon voyage. Au dernier étage des marchés couverts, se trouvent les cantines populaires et leur fameux menus à 8 bolivianos (1 €…).

Une entrée, généralement une soupe, et un plat bien garni de spécialité locale. Aujourd’hui Mondongo chuquisaqueño. Porc accompagné de poivron rouge, maïs moulu, poivron jaune et pommes de terre bouillies.

Pas de touristes ici, tout le monde mange à la même table et chacun taille une bavette avec son voisin. Le plat passe tout seul. Petite balade digestive dans le marché aux mille couleurs.

Nous arrivons dans un patio où tous les étals proposent des jus de fruits frais. Une des vendeuses nous interpelle et nous invite à nous asseoir. Les piles de fruits offrent des couleurs vives et des parfums sucrés. Je salive. Je lui laisse carte blanche et lui demande de me surprendre. Elle relève le défi avec un sourire provocant.

Délicieux… Pour 6 bolivianos (0,75 €) j’ai droit à quasiment un litre de ce nectar des dieux.
Le ventre copieusement rempli, je me sépare de mes acolytes en leur souhaitant buena suerte car ils partent cette nuit vers Cochabamba. Quant à moi, je voulais partir aujourd’hui pour Samaipata, mais Chivo a insisté pour que je reste car il fait un asado. Comment refuser…
Petite sieste digestive à l’hostel et vers 20 h on entame les hostilité…

Chivo règne en maître sur la parilla (BBQ). Pain grillé à l’ail et au fromage, viande parfaitement cuite, quinoa aux petits légumes. Le mec est bon. On se régale.
16 novembre 2018, vers Samaipata.
Je quitte Sucre vers 9 h ; le trajet vers Samaipata devrait me prendre la journée car même si ce n’est qu’à 360 km, les routes de montagnes allongent amplement la durée des trajets.
Vue de la ville depuis les collines en partant.

Je profite une fois de plus de la somptuosité des paysages que je traverse, et la Bolivie a beaucoup de chose à offrir de ce côté là.
J’arrive vers 18 h à bon port. Le village est pittoresque, pavé, fleuri, je me rends sur les hauteurs à La Vispera, hôtel conseillé par Lucila qui y a travaillé quelques temps lors de son périple en Bolivie.
Les logements sont disséminées dans un immense jardin botanique et la tranquillité qui y règne fait passer un peu le prix légèrement excessif de la chambre. La nature est luxuriante et les senteurs florales envoûtantes.


Je me pose sur le lit et laisse tomber la nuit.
17 novembre 2018, Samaipata
Je prends le petit déjeuner à l’hôtel. Jus de fruits frais, œufs frais, pain et confiture maison. Aujourd’hui j’ai une énorme envie de ne rien faire. Rien du tout. Je vais faire ça tiens !
Vers 18 h je prends ma paresse sur le dos et la traine jusqu’au centre bourg. Le chemin est agréable. Je me pose sur la Plaza de armas et reçoit un message de Vincent et Lillian qui sont arrivés à Samaipata.

Du coup nous nous préparons une petite sortie trekking pour le lendemain. Ce sera le Fort de Samaipata où repose la fameuse Pierre de… Samaipata.
Le rendez-vous est pris, on décolle demain vers 11 h.
18 novembre, 2018 Samaipata
Réveil au son de la pluie sur les arbres. Après un en-cas, j’envoie un message à mes compatriotes qui ne se laissent pas intimider par quelques gouttes de pluie. Je les rejoins à leur camping et nous nous lançons lorsque la pluie baisse un peu d’intensité.
Un colectivo nous dépose à 5 km du village, à l’entrée du chemin qui mène au Fort. La route est sinueuse et monte tranquillement. Nous trouvons notre rythme mais lorsque le ciel se fait de plus en plus sombre et chargé, nous décidons de lever le pouce. Nous sommes pris par une camionnette et ne regrettons en rien cette entorse motorisée au principe du trekking car à peine arrivés à l’entrée du Fort, des trombes de pluie dévalent sur le toit de l’office.



Après une petite heure à enculer les mouches en attendant la fin du déluge, nous entamons la marche vers le sommet où se trouve la pierre. Les nuages ont enseveli la montagne et le paysage est réduit à un rideau opaque.

Plus nous prenons de l’altitude, plus les nuages s’estompent. Finalement, après une bonne demi-heure nous arrivons devant la pierre. Un mirador la surplombe pour offrir une vue plongeante. Le travail de sculpture est stupéfiant.

Elle est considérée comme l’une des plus grandes œuvre d’architecture rupestre au monde et classée au patrimoine de l’UNESCO. 250 m de long sur 60 m de large, c’est le plus grand pétroglyphe de la planète. Il date de l’ère pré-Inca. En quechua, Samaipata signifie “lieu de repos entre les montagnes” et cet endroit était une étape religieuse pour le peuple Chané. Il est quasiment situé au centre géographique exact de l’Amérique du sud. Et ouais. Bref un beau morceau. Coté spirituel, il paraitrait que c’est un lieu de forte activité magnétique ; des anciens vont même jusqu’a dire que la pierre n’est pas d’origine terrestre, oui môssieu…
Nous passons un moment à la scruter, nous balader autour, repérer les formes animales (puma, jaguar, serpent). La tentation de la toucher est tellement forte que nous passons la barrière et nous faisons gauler comme des écoliers presque immédiatement par un gardien en embuscade. Nous nous excusons platement redoutant une amende ou une sanction mais non, rien.

Nous terminons le parcours et amorçons la redescente vers le village sous la pluie. Malgré l’humidité, le paysage reste prenant. Je sens que plus je monte vers le nord du pays, plus la nature se densifie. J’ai hâte — et je suis en même temps terrifié — d’arriver dans la jungle. C’est l’endroit au monde qui me fait le plus peur. Il faut que j’aille voir.

De retour au village, petite cervoise et décision d’un autre trekking pour le lendemain. Direction Las Cuevas…
19 novembre 2018, Samaipata, Bolivia
Nous nous retrouvons en fin de matinée sur la place centrale. Quelque petites courses pour la route et nous allons au camping attendre Matthieu et sa copine, des amis de Vincent, qui nous accompagneront pour la randonnée. Ils arrivent vers 13 h juste au moment où je suis sur le point m’impatienter. La copine de Matthieu me fait un peu peur au premier coup d’œil. Elle est de Santa Cruz et ne semble pas être bien équipé pour faire un trek. Petites Nike citadines toutes propres, petit T-shirt blanc, jeans moulants et petit sac en bandoulière. En même temps, elle est de la région, elle doit connaitre. Nos regards se croisent avec Vincent, nous relevons le sourcil et rions. En avant.

Nous prenons une camionnette qui doit nous déposer à l’entrée du Trail. Nous posons quelques questions au chauffeur sur le trajet et la manière d’arriver à bon port et il nous explique que nous devons payer si nous passons par le chemin normal. En revanche il connait l’entrée d’un camino de vacas (chemin de vaches) qui rejoint le sentier du trek et qui est gratuit. En bon crevards nous acceptons. Il nous explique le trajet, deux cols à passer puis tourner à gauche pour rejoindre la rivière en redescendant, longer la rivière jusqu’à la cascade et hop on y est. Sur le papier tout parait parfait, nous voici partis, le cœur vaillant et l’esprit léger.

La première ascension se fait sur un chemin de terre rouge où il semble effectivement que des vaches soient passées il y a peu.

Au détour d’un chemin, je vois, dans les sous-bois, une vache qui semble coincée dans un trou. En bon samaritain, je descends voir de plus près ce qu’il en est. Elle est effectivement coincée dans un trou avec des racines qui l’empêchent d’appuyer sur ses pattes arrières. Je sors mon coutelas et coupe les racines qui semblent la retenir. Il faut ensuite l’aider à sortir. Nous échangeons des regards interrogatifs. Pas trop de fermiers dans la bande, mon expérience de cowboy en argentine est un peu loin et la bête a des cornes bien pointues. Nous tentons la petite claque amicale sur la fesse mais c’est un gros bestiau et il va en falloir plus pour la faire bouger. Vincent commence à la pousser au cul pendant que je pousse sur le côté ; la pauvre bête, exténuée, se débat comme elle peut et parvient finalement à sortir du bourbier. Je manque de peu le coup de corne dans le bide lorsqu’elle sort du trou, mais plus de peur que de mal.

Tout fiers de notre bonne action, nous reprenons notre ascension. En cours de route, deux chiens se joignent à nous et semblent nous indiquer le chemin. Nous rattrapons quelques vaches que nous nous apprêtons à dépasser lorsque l’une d’elle se retourne et nous fait front. Elle semble prête à charger et ses cornes n’ont rien de rassurant. Nous faisons quelques pas en arrière pour lui laisser de l’espace. Nous comprenons qu’elle protège son veau. Et elle a l’air très mère poule (un comble pour une vache, ok je sors…)

Les chiens prennent la relèvent pour faire avancer les bovins, c’est leur travail à n’en point douter vu l’entrain qu’ils mettent à aboyer et provoquer la bête qui fait cinq fois leur taille. Heureusement qu’ils sont là, sinon, au train où vont les vaches, on dormait là.
Le chemin devient vraiment un chemin de vaches, il n’a plus aucune forme…

Arrivé au premier col, il se rétréci. Les vaches sont parties dans une direction qui nous mène à une impasse. Nous rebroussons chemin et tentons de trouver une trace à suivre. La vue est superbe.


Nous évaluons à peu près la direction à prendre pour rejoindre la rivière en contrebas. Nous retrouvons une trace un peu plus bas qui nous emmène vers la rivière. Arrivés là, une petite heure plus tard, nous dégotons avec difficulté un endroit où traverser. Nous devons à présent longer la rivière jusqu’à la cascade. Nous repérons une trace de la taille d’un pneu de vélo qui semble aller dans la direction désirée.

L’heure tourne, et je redoute un peu l’arrivée de la nuit avant que nous ayons rejoint les chutes. Je passe devant et pars en éclaireur d’un pas un peu plus rapide. Nous passons colline après colline et finalement, après une petite traversée dans un bois, nous débouchons sur la cascade. Soulagement. Après 4 heures de marche nous sommes récompensés.


Nous nous posons un moment sur la plage au pied de la cascade puis nous dirigeons vers la sortie entretenue et balisée. Arrivés au niveau de la route, surprise, les portes sont fermées. Nous trouvons un gardien qui nous demande nos tickets d’entrée… Euh… Ben… On les a perdus. Il n’y croit pas une seconde et nous informe que, pour sortir, il faudra payer. Ironie du sort…
De retour au village se sera grosse pizza et bière pour se remettre de cette magnifique randonnée.

Demain départ pour Santa Cruz de la Sierra où une malédiction me guette…